«Comment peut-on encore parler de libre choix?»

La caisse maladie Visana rompt à son tour ses accords avec trois cliniques genevoises. Une décision qui relance la question du financement des soins et du rôle des assureurs.

, 6 février 2025 à 08:23
dernière mise à jour le 7 février 2025 à 08:14
image
Bras de fer entre Visana et les cliniques genevoises | Image: capture d'écran du reportage diffusé par Léman Bleu le 4 février 2025
Visana, l'assureur maladie de près de 1’900 Genevoises et Genevois, a mis fin à ses accords avec trois cliniques du canton au 1er février: la Clinique La Colline, la Clinique des Grangettes et l’Hôpital de la Tour.
En cause, des tarifs jugés trop élevés. Malgré des négociations intensives, aucun accord tarifaire n’a été trouvé avec ces établissements, indique le porte-parole de Visana, Josko Pekas, dans une interview accordée à «Léman Bleu».

Cliniques sous pression

De son côté, l’Hôpital de la Tour explique avoir consenti à des «baisses tarifaires drastiques» pour tenter de concilier maîtrise des coûts et qualité des soins. «Cependant, nous ne pouvons pas accepter des tarifs qui ne couvriraient pas le coût réel de la prise en charge de nos patients», précise son porte-parole.
«Ici, on a la main lourde, car les pénalisés ne sont pas d’abord les cliniques, mais bien les patients, captifs de cette assurance.» — Mauro Poggia, conseiller aux États
En effet, il s'agit notamment de savoir si les caisses maladie souhaitent éviter une hausse des tarifs ou s'ils réclament au contraire leur baisse. «Je peux comprendre qu’on s’oppose à des augmentations», souligne Maura Poggia, conseiller aux États, «mais s’ils ont jusqu’ici considéré que ces tarifs étaient corrects pour un assureur complémentaire, pourquoi ces tarifs seraient excessifs tout d’un coup?»
Une position partagée par le président de l’Association des médecins du canton de Genève (AMGe), pour qui «quand un assureur vient placer le business avant la santé, on dit au secours, c'est inadmissible.»
La porte-parole de l’Hôpital de la Tour rappelle également que le financement public des soins est plus limité à Genève que dans d’autres cantons, ce qui renchérit mécaniquement la facture des assureurs de 30 à 40%. «Cela accentue donc encore la pression sur les négociations tarifaires et nous fait virtuellement apparaître comme le plus cher de Suisse.»

Patients, premières victimes

Sur le terrain, ce sont les patients qui subissent les principales conséquences de cette décision. Mauro Poggia déplore une situation déséquilibrée: «Ici, on a la main lourde, car les pénalisés ne sont pas d’abord les cliniques, mais bien les patients, captifs de cette assurance.»
Une habitante de Carouge, inquiète de la situation, rapporte qu’elle paie depuis une trentaine d’années «une assurance semi-privée ainsi qu'une assurance de base auprès d'un autre assureur avec libre choix du médecin, mais comment peut-on encore parler de libre choix alors que certains médecins n'opèrent que dans une clinique spécifique? Et pourquoi devrais-je aller me faire opérer dans une clinique lausannoise?»
Visana n’est pas la première caisse maladie à rompre ses accords avec certaines cliniques en raison des coûts pratiqués. En 2024, Helsana, le Groupe Mutuel et Sanitas avaient pris des décisions similaires. Après plusieurs mois de négociations, Helsana et l’Hôpital de la Tour avaient toutefois fini par trouver un terrain d’entente.
«Désaccord entre assureurs et médecins indépendants: patients dans l'incertitude», dans le 19h30 de la RTS, émission du 6 février 2025

Partager l'article
  • Share
  • Tweet
  • Linkedin
  • Whatsapp
  • Telegram
Commentaire

Abonnez-nous et recevez notre newsletter chaque semaine.

ou

Quelle est votre profession?

Où travaillez-vous?*

undefined
undefined

*Ces informations sont facultatives et seront traitées de manière anonyme.
Pourquoi les demandons-nous?
Medinside vous offre un service gratuit d'informations et de contributions. Pour maintenir ce service, nous dépendons de la publicité. Notre objectif est que vous ne voyiez sur Medinside que des publicités pertinentes, adaptées à vos centres d'intérêt. En recueillant des informations sur le profil général de notre audience et en les traitant de manière anonyme, nous permettons à tous d'en bénéficier: vous, chers lecteurs et chères lectrices, ainsi que nos partenaires et nous. Merci!


Plus d'informations sur ce sujet

image

«Il n'y a qu'à Genève et Vaud que nous avons encore des problèmes»

La Finma n'approuve aucun nouveau produit des assureurs-maladie complémentaires tant que toutes les exigences de transparence ne sont pas remplies – et tant que les sociétés médicales de l'arc lémanique font la sourde oreille.

image
Commentaire de Guido Schommer

Populisme réglementaire: qui protège les assurés de la Finma?

L'autorité de surveillance veut renforcer la réglementation du marché des assurances complémentaires. Loin de protéger les assurés, cette approche risque d’avoir l’effet inverse: mettre les hôpitaux sous pression, restreindre le libre choix des patients et compromettre la qualité des soins.

image

Obligation de contracter: plus de concurrence ou de bureaucratie?

Réduire l'excès d'offre, maîtriser les coûts: la Commission de la santé mise sur un assouplissement de l'obligation de contracter. Les hôpitaux tirent la sonnette d'alarme.

image

Genève: nouvelles bourses de formation en soins infirmiers

Des bourses pour les futurs infirmiers et infirmières: Genève mise sur un soutien financier pour encourager les inscriptions et limiter l'abandon des études dans un secteur sous tension.

image

Tarmed: hausse des tarifs en Valais après un litige de huit ans

Le Conseil d’État relève la valeur du point Tarmed, une décision qui génère des revenus supplémentaires mais qui reste en deçà des attentes des prestataires de soins.

image

Garanties de paiement tardives: quel impact financier?

Selon une étude, près d’une patiente sur deux doit multiplier les démarches pour faire prendre en charge sa réduction mammaire par l'assurance maladie. Une situation engendrant un surcoût moyen de 2'400 francs.

Du même auteur

image

Réinsertion et santé mentale: Fribourg mise sur la coordination

Le centre d'accueil La Tuile et le Réseau fribourgeois de santé mentale signent une convention pour renforcer la complémentarité de leurs accompagnements, entre hébergement, soins et suivi social.

image

Le personnel infirmier français devrait gagner en autonomie

Consultations, diagnostics, prescriptions: en France, les infirmières et infirmiers devraient bientôt voir leurs compétences élargies grâce à une nouvelle loi adoptée à l'unanimité par l’Assemblée nationale.

image

HUG: nouvelle direction au Département d’exploitation

Adib Nahas prend la tête du Département d’exploitation des Hôpitaux universitaires de Genève. En attendant son entrée en fonction, l’intérim sera assuré par Sophie Meisser, responsable du pôle Responsabilité sociale et environnementale.